72hr love CODE Épisode 3 Le Marché du Diable

Rédigé le 15/11/2025
Remy Guehoada


La fumée de cigarette monte en spirales paresseuses vers le ventilateur qui tourne au plafond. Les pales brassent l'air chaud sans le rafraîchir. Juste un mouvement hypnotique. Inutile.

Akaba fixe sa bouteille de bière. La condensation forme des rivières sur le verre. Une goutte tombe. S'écrase sur la table. Fait une tache sombre sur le bois éraillé.

Idaga allume une cigarette. La flamme du briquet éclaire son visage une seconde. Elle aspire. La braise rougeoie.

"Alors ?" dit-elle en soufflant la fumée. "Ta femme ?"

Akaba ne répond pas. Ses doigts serrent la bouteille. Les jointures blanchissent.

Derrière eux, le bar vibre. Un homme hurle en yoruba. Un autre lui répond en douala. Rires explosifs. Une chaise racle le sol. La télé diffuse maintenant un clip de musique urbaine. Basses saturées. Une fille en minijupe danse. Personne ne regarde vraiment.

Le patron derrière le comptoir lave des verres. Plonge. Frotte. Rince. Le bruit de l'eau couvre presque les conversations. Presque.

"Hé !" Idaga tape sur la table. "Je t'ai posé une question."

Akaba lève les yeux. Ses pupilles sont dilatées. Noires. Profondes comme des puits.

"Je ne sais pas par où commencer."

"Par le début." Idaga tire une nouvelle bouffée. "C'est toujours plus simple."

Elle se penche en arrière. Sa chaise balance sur deux pieds. Dangereux. Elle ne semble pas s'en soucier.

Akaba boit. Une longue gorgée. La bière est déjà tiède.

"J'ai une belle vie," commence-t-il. Sa voix est mécanique. Comme s'il récite un texte appris. "Trois enfants. Une grande maison à Logpom. Ma propre entreprise. Une banque. Des filiales en Afrique du Sud, au Nigeria..."

"Je m'en fous de ton CV," coupe Idaga. "Ta femme. Qu'est-ce qui s'est passé ?"

Les mâchoires d'Akaba se contractent. Les muscles de son cou se tendent.

"Je rentrais tôt. Pour lui faire une surprise."

Il s'arrête. Avale sa salive.

"Continue," presse Idaga.

"La porte n'était pas verrouillée. J'ai trouvé ça bizarre. Mais je me suis dit qu'elle avait oublié."

Sa main tremble légèrement. Il la pose à plat sur la table pour la stabiliser.

"Je suis entré. Silence dans la maison. Les enfants étaient à l'école. J'ai monté les escaliers."

À une table voisine, trois hommes jouent aux cartes. Clac. Clac. Clac. Les cartes s'abattent. L'un d'eux jure. Les autres rient.

"Et là..." La voix d'Akaba se brise.

Il se tait. Ferme les yeux. Les rouvre.

"Je l'ai vue."

Idaga attend. Ne bouge pas. La cigarette se consume entre ses doigts.

"Dans notre chambre. Dans notre lit. Avec un homme."

Les mots tombent comme des pierres. Lourds.