Ombres de Yaoundé Episode 4 Le piège se referme

Rédigé le 22/11/2025
JC. Madiba


Elle arrive à trois mètres. Se cache derrière un pilier.

Hervé pousse une enveloppe kraft vers le Blanc. Celui-ci l'ouvre, sort des photos. Les examine. Hoche la tête. Glisse l'enveloppe dans sa mallette. Il tend une autre enveloppe à Hervé. Celui-ci l'ouvre. Billets d'euros. Il sourit, serre la main du Blanc.

Le deuxième Camerounais sort un téléphone, montre l'écran à Hervé. Une liste de noms. Hervé hoche la tête, dit quelque chose. Le Blanc se lève, rajuste sa veste. Les trois hommes se serrent la main. Le Blanc part vers la sortie.

Nadia recule, se fond dans la foule. Rejoint Samuel au bar.

— C'était Hervé Kamga, souffle-t-elle. Mon ancien patron.

— Qu'est-ce qu'il faisait ?

— Il vendait quelque chose. Des photos. Des noms. À un Européen.

Samuel blêmit.

— C'est ça. C'est le réseau. Ils vendent les identités. Les disparus.

Nadia sort son téléphone, prend une photo discrète d'Hervé. L'image est floue, mais reconnaissable.

La musique s'arrête brutalement. Les lumières s'allument. Trop vives. Les gens grognent, protègent leurs yeux.

Une voix masculine tonne dans un micro.

— Contrôle de police ! Personne ne bouge !

Panique. Les gens se ruent vers les sorties. Chaises renversées. Verres brisés. Cris. Sifflets. Des policiers en uniformes bleus entrent par toutes les portes. Matraques à la main.

Samuel attrape Nadia.

— On file !

Mais trop tard. Un policier les bloque. Jeune, visage dur.

— Vos papiers.

Nadia sort son passeport canadien. Le policier l'ouvre, fronce les sourcils.

— Canadienne ? Qu'est-ce que tu fais ici ?

— Tourisme.

Le policier ricane. Regarde Samuel.

— Et toi ?

Samuel fouille ses poches, sort sa carte d'identité. Le policier la prend, l'examine. Puis il se raidit. Lève les yeux.

— Samuel Tchoumi. Le journaliste.

Samuel déglutit.

— Oui.

Le policier parle dans son talkie.

— J'ai Tchoumi. Ici. Avec une femme.

Grésillement. Puis une voix répond.

— Amenez-les au commandant Kamga.

Nadia et Samuel échangent un regard. Le policier les saisit par les bras.

— Suivez-moi.

Il les pousse à travers la foule. Vers le fond. Vers la banquette rouge. Hervé est toujours là. Il glisse l'enveloppe dans sa poche, se lève.

Et puis il voit Nadia.

Son visage se vide de couleur. Ses yeux s'écarquillent. Il reste figé, bouche entrouverte.

Nadia soutient son regard.

Hervé se reprend. Sourit. Un sourire froid, calculé.

— Nadia Mballa. On m'avait dit que tu étais morte.

Nadia ne sourit pas.

— On dit beaucoup de choses.

Hervé s'approche. Il sent le cigare et l'eau de Cologne chère. Il la détaille de haut en bas.

— Qu'est-ce que tu fais ici ? À Yaoundé ? Dans *mon* bar ?

— Ton bar ?

Hervé écarte les bras.

— Je suis actionnaire. Il faut bien diversifier ses revenus. Tu sais comment c'est.

Samuel intervient.

— Commandant Kamga, on ne faisait rien de mal. On buvait juste

Hervé lève une main. Samuel se tait.

— Je ne parlais pas à toi, Tchoumi. Je sais qui tu es. Je lis ton petit blog. Très... divertissant.

Il se tourne vers Nadia.

— Tu traînes avec des gens dangereux, Nadia. Des gens qui posent trop de questions.

— Et toi, tu traînes avec des Européens qui achètent des identités.

Le sourire d'Hervé disparaît. Son visage durcit. Il claque des doigts. Quatre policiers encerclent Nadia et Samuel.

— Emmenez-les au commissariat. Contrôle d'identité approfondi. Ils vont y passer la nuit.

Un policier saisit Nadia par le bras. Elle résiste. Sa main glisse vers son holster.

Hervé la voit. Sort son propre pistolet. Le pointe sur elle.

— Ne fais pas ça.

Nadia se fige. Les autres policiers sortent leurs armes. Samuel lève les mains.

— On coopère. Pas de problème.

Nadia serre les poings. Lentement, elle lève les mains aussi.

Hervé s'approche, saisit le Glock sous sa veste. Le glisse dans sa ceinture.

— Bienvenue à la maison, Nadia.

Les policiers les poussent vers la sortie. La foule s'écarte. Dehors, la nuit est fraîche. Pluie a repris. Fine, légère. Deux voitures de police attendent. Gyrophares tournent en silence.

On pousse Nadia et Samuel dans le même véhicule. Banquette arrière. Odeur de plastique et de sueur. Grillage sépare l'avant de l'arrière. Un policier démarre. La voiture s'éloigne.

Samuel se penche vers Nadia.

— Qu'est-ce qu'on fait ?

Nadia regarde par la vitre. Les rues défilent. Elle ferme les yeux.

— On attend.

La voiture roule dans la nuit. Les lumières de Yaoundé s'estompent derrière eux.


FIN DE L'ÉPISODE 4
À SUIVRE...